
Hannah le défit ; tout en haut elle découvrit une liasse de longues feuilles de papier soigneusement enveloppées. Les feuilles étaient couvertes de vers en hébreu, et Abram était le seul de la famille qui savait le lire. Comme Ezekiel avait parfois usé d'un certain franc-parler, Hannah craignait que ses écrits ne comportent une teneur nihiliste qui pourrait causer des ennuis à eux tous. Elle eut peur de demander à un étranger de quoi parlaient ces textes. À cette époque, il suffisait de dire d'une famille 'ils sont nihilistes', pour les faire arrêter immédiatement ; la police investiguait à loisir. Il y en avait trop pour brûler tout en une fois ; elle brûla donc plusieurs feuilles chaque matin jusqu'à ce qu'elles aient toutes disparu. En livrant la première page aux flammes, elle dit : 'Voici la vie d'un homme'.
Charles Reznikoff,
Sur les rives de Manhattan, traduction Eva Antonnikov, Éditions Héros-Limite, p. 75.
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