samedi 24 décembre 2016

Die spanische Trilogie, III

"Que toutefois, quand j'aurai de nouveau
la cohue des cités, l'écheveau embrouillé du bruit,
le désordre des véhicules autour de moi, très seul,
qu'il me souvienne toutefois, par-delà l'épaisse machine,
de ce ciel, et de ce rebord terreux de la montagne
que le troupeau franchissait au retour.
Que j'aie pierreux le cœur
et que je croie l'ouvrage du berger possible :
rentrer, brunir, et par le jet de pierre qui mesure,
ourler, où il s'effrange, le troupeau.
Le pas lent, sans légèreté, le corps pensif,
mais debout, souverain. Un dieu pourrait encore
adopter, sans déchoir, cette figure.
Tour à tour il s'attarde et passe, tel le jour,
et les ombres des nuages
le traversent, comme des pensées que l'espace
penserait pour lui, lentement.

Qu'il soit qui vous voudrez. Comme la veilleuse vacillante
dans le manteau de la lampe, je me tiens en lui.
Une lueur se calme. Que la mort
se retrouve, plus pure."

Rainer Maria Rilke, Poèmes épars (1907-1926), traduction Philippe Jaccottet, Points Poésie.

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