lundi 24 août 2009

Rapport, III, 5

De deux fenêtres jumelles, presque confondues mais séparées par un mur, on peut, accoudé :

ou bien observer au loin un paysage marécageux, une zone commerciale sur un remblai artificiel, car l’immeuble se situe sur une île en triangle entre deux bras d’une rivière et un canal perpendiculaire, île sans être île, ancien port de constructions navales, pointe dans la rivière, vers un fleuve, vers la mer, comme on afflue

ou bien observer la rivière elle-même, en léger contrebas, qui passe entre les piles d’un ancien pont, entre celles d’un plus récent, sur lequel passe la départementale

aplats d’eau beige, envasée, grisâtre

plaques d’eau, flaques dans l’eau, huileuses

disparaissent à intervalles réguliers

réapparaissent

boucles dans l’eau

courants en boucles

on imagine une topographie subaquatique

un relief dans le lit

qui transmettrait à la surface des formes, jamais complètement inattendues malgré le fluide, le courant, la vitesse

comme on scrute un ciel nuageux, on scrute la surface de l’eau, à ceci près qu’on attend le retour des formes, cherchant une stabilité dans ces méandres changeants

un treillis dans le clapotis

autour des piles se repère le même mouvement, une identité de forme répondant cependant à la saison, à la force du courant, que l’on retrouve à tout endroit du cours, pour peu qu ‘on le fixe suffisamment longtemps, à moins qu’il ne se stabilise qu’à cause de la stabilisation de l’œil, points de repères fabriqués pour l’occasion.

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